Attention aux conclusions hâtives


Nous entendons souvent le conseil suivant lequel il ne faut pas tirer de conclusions hâtives. Mais ce n'est pas si facile. J'ai observé que les personnes intelligentes peuvent être particulièrement sujettes à ce piège parce que leurs conclusions prématurées sont assez souvent correctes pour leur permettre d'ignorer les fois où elles ne le sont pas. J'ai eu la chance, dans ma propre vie, que les occasions où j'ai découvert à quel point j'étais dans l'erreur aient tendance à se produire à des moments mémorables.

L'une de ces occasions s'est produite lors de ma première retraite de méditation, qui s'est déroulée dans une grande maison d'un petit village du sud de l'Angleterre. Nous dormions à quatre ou cinq par chambre. J’étais très impressionné par le méditant qui occupait le lit voisin du mien. Chaque jour, dans la salle de méditation, il restait assis, parfaitement immobile, le dos droit, du matin au soir. Il semblait avoir un samādhi très fort et j'avais hâte de lui parler après la retraite. Tard dans la nuit, je fus réveillé par un bruit soudain et je vis cet homme se glisser discrètement dans la chambre.

Il était évident qu'il était sorti. Lorsqu'il vit que je le regardais, il s’assit sur le lit à côté de moi. Il avait l'air embarrassé : "Je n'en pouvais plus. Ma petite amie me manque tellement. J'ai failli m'enfuir aujourd'hui. Mais je lui ai parlé au téléphone et elle m'a persuadé d'aller jusqu'au bout. Désolé de vous avoir réveillé."

Mon premier modèle, "a-t-il atteint un certain stade d'éveil ?”, était un jeune homme stressé à qui sa petite amie manquait, et dont l’esprit était agité d’un ouragan de pensées. Mon conseil : si vous avez déjà vécu une telle expérience, ne laissez pas le souvenir s'échapper de votre esprit.

Ajahn Jayasāro 13/8/24