Le grand défi de la pratique du Dhamma


Chaque jour, où que nous soyons, avec qui que ce soit, notre vie est un flux de phénomènes physiques et mentaux : formes, sons, odeurs, goûts, sensations tactiles, pensées, perceptions et ressentis. C'est le monde réel : le monde de l'expérience directe. Il n'est pas le fruit du hasard et ne fait pas partie d'un plan divin. C'est la manifestation d'un flux de causes et de conditions d'une complexité inimaginable sans commencement.

Sans la pleine conscience et la compréhension claire (sati-sampajaññā), un sentiment de propriété domine la conscience. Nous prenons tout personnellement : "Je" vois, "j'"entends, "je" sens, "je" goûte, "je" touche, "je" pense, "je" perçois, "je" ressens. Mais en présence de la pleine conscience et d'une compréhension claire, ce sens de la propriété disparaît. Il reste la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût, le toucher, la pensée, la perception, le ressenti, qui apparaissent et disparaissent. En réfléchissant à cela, nous nous rendons compte que notre sentiment d'identité personnelle n'est ni stable ni fiable. Les idées que nous avons sur nous-mêmes, toutes les hypothèses sur lesquelles nous fondons notre vie, dépendent de l'absence de sati-sampajaññā. Cette découverte remarquable peut être à la fois exaltante et effrayante.

En relevant le grand défi de la pratique du Dhamma, nous réexaminons et reconnaissons tout ce que nous avons pris pour acquis, encore et encore. Nous apprenons à regarder les matières premières de notre vie avec un regard neuf et impartial. Nous nous engageons dans une quête pour transcender toutes les façons dont nous avons limité et construit notre conscience. 

Ajahn Jayasāro
15/06/24