Les effets insidieux des commérages


Les commérages sont un poison. Ils ne minent pas seulement les relations personnelles. Ils peuvent même détruire des pays entiers.

À l'époque du Bouddha, les Licchavis, dont la capitale était Vesāli, formaient un clan fier et puissant, membre principal de la confédération Vajjika. L'ambitieux roi Ajātasattu de Maghadha révéla au Bouddha qu'il avait l'intention de les envahir. Le Bouddha lui dit que l'harmonie du peuple Licchavi et son unité les préserveraient. Le roi renonça à l'invasion et tenta une approche plus subtile. Il ordonna à son Premier Ministre de se rendre auprès d'un Licchavi influent, dans un endroit calme, mais qui serait observé. Il devait murmurer à l'oreille de l'homme la phrase suivante : “Il y a du riz dans le grain.” Le premier ministre s'exécuta et son action fut effectivement remarquée. Un noble Licchavi demanda à sa connaissance ce que le Premier Ministre de Maghada considérait si important qu'il devait le lui chuchoter à l'oreille. Le premier noble répondit honnêtement que tout ce qu'il avait dit, c'était qu'il y avait du riz dans le grain. Le second noble était contrarié. Il pensa : "Pourquoi diable le Premier Ministre de Maghada dirait-il une chose aussi banale d'une manière aussi secrète. Cet homme ment. Il ne me fait pas confiance. Il prépare quelque chose.” Rempli de soupçons, il dit à un ami que l'autre homme avait chuchoté avec le premier ministre de Maghada. Cette personne le répéta à une autre personne, et ainsi de suite. Très vite, la croyance que le premier homme était un espion et qu'un complot se tramait s'est répandue. Les préjugés se sont enflammés, des accusations furent proférées, des disputes éclatèrent. La paix et l'harmonie disparurent. C'est alors que le roi Ajātasattu saisit sa chance. Il envahit le pays affaibli et remporta une victoire facile.

Ajahn Jayasāro
31/10/23