Une île qu'aucune inondation ne peut submerger
Les moines de la forêt sont encouragés par leurs maîtres à se rappeler chaque jour toutes les façons dont leur vie pourrait soudainement changer pour le pire. Ils peuvent être mordus par un serpent venimeux, un scorpion ou un centipède. Ils peuvent tomber et se fracturer un membre. S'ils vivent seuls, il peut se passer des heures, voire des jours, avant que quelqu'un ne les retrouve. La mort peut survenir à tout moment et de différentes manières. Le but de cette réflexion n'est pas de rendre les moines anxieux ou craintifs, mais de les encourager dans leur pratique du Dhamma. L'essentiel est que les moines se demandent s'ils sont prêts à affronter tout ce que la vie peut leur présenter à tout moment. Font-ils bon usage de leur temps précieux ? Quels dhammas malsains subsistent dans leur cœur, quels dhammas sains ne sont pas encore développés ? Ont-ils atteint un véritable refuge, un refuge qui les soutiendra quoi qu'il arrive ? Nous pouvons utiliser notre intelligence pour créer des moyens en vue d’optimiser notre sécurité. Mais la vie sera toujours, dans une certaine mesure, incertaine et risquée. Les villes recèlent autant, sinon plus, de dangers que les forêts. Souhaiter que les choses soient différentes et être en colère parce qu'elles ne le sont pas est une complaisance autodestructrice.
Ce que nous pouvons faire, c'est apprendre à faire le meilleur usage possible du temps incertain dont nous disposons dans ce monde. En utilisant les enseignements du Bouddha, nous pouvons créer un refuge intérieur, une île qu'aucune inondation ne peut submerger.
Ajahn Jayasāro
08/10/2022